Tout commence par l’envie

L’être humain est une créature à dimensions multiples. Même si les différentes facettes de notre existence – famille, amitiés, personnalité, carrière professionnelle,… – interfèrent les unes avec les autres, leur construction nécessite la mise en œuvre d’actions spécifiques et la capacité à surmonter ici un manque de connaissances, là un trait de caractère qui nous handicape. Si nos objectifs de vie varient bien entendu d’un individu à un autre, selon son âge et ses priorités, chacun peut dresser le panorama des grands domaines dans lesquels il pourra identifier ses envies. Je ne parle pas ici de souhait, mais bien d’envie. D’une force qui va me permettre d’être tiré par mon objectif, me redonnant enthousiasme et motivation lorsque je serai tenté de baisser les bras, plutôt que de devoir pousser cet objectif par un effort de volonté constant qui finira par m’épuiser. Le souhait est vite balayé dès que les obstacles surviennent car on accepte aisément que notre vie puisse se poursuivre sans pour autant que l’objet du souhait se concrétise. L’envie, elle, est portée par une réelle aspiration qui nous tient ferme et rend inimaginable le fait de ne pas voir notre objectif prendre vie. Le souhait utilise nos ressources existantes ; l’envie nous pousse à changer et à aller chercher de nouvelles ressources car elle seule va réellement nous permettre d’oser.

Après seize années passées chez Air France, puis au sein d’un grand cabinet de conseil à occuper différents postes à responsabilités en communication, marketing et management de consultants, Ariane sentait clairement qu’il était temps de passer à autre chose. Diplômée de HEC, « bonne élève sans vocation particulière » selon ses termes, elle appréciait son métier, mais aucun des postes qu’elle avait occupés ne lui avait apporté une totale satisfaction. C’est aussi le moment où Ariane s’interroge sur les valeurs qu’elle souhaite promouvoir pour sa vie, elle qui fait du contact humain et de l’art de vivre des éléments essentiels pour apprécier pleinement son quotidien. Des valeurs qu’elle perçoit de moins en moins dans un monde de l’entreprise « devenu de plus en plus dur pour l’individu » et qui contribue chaque jour davantage à sa frustration. La découverte, par hasard sur Internet, du métier de diététicien-nutritionniste, a l’effet d’une révélation. « Faire ce métier ne m’avait jamais effleuré » me confie-t-elle. « Mais je réalisais à présent qu’il répondait parfaitement à mes aspirations, aussi bien sur le fond en accompagnant les personnes vers un meilleur équilibre de vie, que sur la forme en me permettant de devenir mon propre patron et de ne plus être tributaire du monde de l’entreprise ». Désormais, Ariane comprend que la réalité de sa reconversion n’est qu’une question de temps, malgré son bagage scientifique limité, malgré les conséquences financières qu’implique le fait de quitter un poste très bien rémunéré. En femme pragmatique et réfléchie, elle a alors pu construire étape par étape le chemin vers sa nouvelle vie et concrétiser son projet trois ans plus tard.

L’envie peut être aussi celle de ne plus vivre selon un modèle qui nous est devenu insupportable. Anne témoigne ainsi : « J’ai toujours été portée par l’addiction sous une forme ou une autre, tabac, drogue ou alcool. J’aimais boire, seule le soir, en rêvant à ce que j’allais pouvoir accomplir le lendemain. D’une certaine manière, cette façon de vivre me convenait, même si bien évidemment ces lendemains débutés avec une gueule de bois étaient bien différents de ceux dont j’avais rêvé la veille. La gêne a commencé à s’installer lorsque mes enfants ont grandi et que mon état provoquait de plus en plus de questions et remarques de leur part. Puis cette gêne a fait place à la honte lorsque l’un de mes amis m’a reproché de ne lui téléphoner que lorsque j’étais ivre et qu’il a exigé que je cesse de l’appeler » explique-t-elle. « Un soir, j’ai réalisé que mes mains tremblaient. J’avais à peine quarante ans. J’ai alors vraiment pris conscience d’être devenue une esclave et que la femme que j’étais avait été remplacée par son addiction. Cet évènement a constitué le vrai déclencheur de mon changement » reconnait Anne.

Les témoignages d’Ariane et Anne révèlent un dénominateur commun : le changement profond et durable passe souvent par un déclic, une prise de conscience, pour ne pas dire une révélation : « C’est ça que je veux pour ma vie ».  Cette envie qui nous habite alors n’empêche évidemment pas les obstacles, mais elle apporte la conviction que le changement est à notre portée, car dès lors dans notre tête nous avons déjà changé.

Publié par Alain Orsot

Découvrir nos moteurs et comprendre nos freins pour se construire. Auteur de "Reprendre sa vie en main", "En finir avec la crainte de changer", "Les trois clés des bâtisseurs"

4 commentaires sur « Tout commence par l’envie »

  1. Pour Spinoza c’est un autre mot qui nous transporte vers de tels résultats, c’est le « désir »….

    « Le désir est l’essence de l’homme » dit-il. J’ai personnellement le sentiment d’une différence de fond entre « envie » et « désir ». Il me semble en effet que « l’envie » se décide, « j’ai envie d’une glace…. » tandis que le désir nous envahit, il est incontrôlable, et naturellement les exemples ne manquent pas, du « désir charnel » au « désir d’enfant », en passant par le désir de revoir ou d’entendre au téléphone un être cher disparu….etc

    La conséquence pourrait se présenter sous forme d’une plus grande difficulté à franchir les obstacles d’une envie que ceux d’un désir. Car l’envie pourrait être plus facilement « passagère » que « le désir ». Si tel est le cas, connaître ses désirs pourrait alors être plus « essentiel » que ses envies….. Je ne sais pas si c’est juste, mais c’est un peu mon expérience, que je partage ici.
    Merci pour votre réflexion..

    Aimé par 1 personne

  2. Merci Alexandre pour votre commentaire, vous avez complètement raison. Le mot « désir » serait en effet sûrement plus approprié, en tout cas pour refléter cette « envie profonde et durable » (bien différente du « souhait » superficiel et passager) qui raisonne avec nos fondements et déclenche en nous une vraie prise de conscience.

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